Comme chaque année depuis 2015, Solidaris a interrogé plus de 1000 personnes concernant le report de soins pour raisons financières. Le constat est en demi-teinte. Aujourd’hui, en Wallonie et à Bruxelles, plus d’une personne sur 3 doit renoncer à certains soins pour des raisons financières !
L’enquête de Solidaris montre que par rapport aux trois dernières années, le report de soins pour raisons financières est plutôt en amélioration. Tous types de soins confondus, 36% des belges francophones déclarent avoir renoncé à au moins un soin cette année contre 45% en 2021. Nous sommes toutefois toujours au-dessus des niveaux de 2015, 2016 et 2017.
En outre, le nombre moyen de soins auxquels on renonce s’élève à 2,89 (2,76 en 2021), confirmant qu’il ne faut pas se réjouir trop vite de cette amélioration qui masque surtout des inégalités toujours plus grandes et inquiétantes.
Ainsi, la moitié des groupes sociaux les plus précaires est concernée par un report de soins (50,6%, + 8 points), creusant les inégalités sociales et de santé. Pour les personnes les plus aisées, la situation se rétablit au niveau de 2015 (un quart d’entre elles reportent pour raisons financières). A cela s’ajoute la situation des personnes en incapacité de travail qui reste particulièrement problématique : elles sont deux tiers à avoir dû reporter au moins un soin en 2022 (+11 points vs 2015). Plus spécifiquement, les personnes qui peuvent être considérées en dépression modérément sévère ou sévère sont quant à elles 77% (+15 points en 7 ans) à reporter au moins un soin pour raisons financières.
Non sans lien, notre enquête révèle par ailleurs que le report de soins a fortement augmenté pour les soins en santé mentale (+9 points, 19% de la population) et chez les spécialistes (+7 points, 21% de la population) depuis 2015. Les soins dentaires restent avec 25%, la catégorie la plus reportée. Soulignons enfin que les médicaments constituent le soin reporté pour lequel l’écart entre les groupes sociaux les mieux lotis et les plus précaires est le plus élevé (22 points).
D’autres catégories de la population sont également davantage concernées par le report de soins et demeurent les mêmes, vague après vague : les femmes, les familles monoparentales et les 40-59 ans. Alors que 4 femmes sur 10 ont dû renoncer à au moins un soin cette année (+5 points sur 7 ans), le chiffre est de 3 sur 10 chez les hommes (+3 points). Du côté des familles monoparentales, on parle de plus d’une personne sur deux concernée (54%, +7 points). Quant aux 40-59 ans, ils sont près de 4 sur 10 (42,5%) à avoir reporté au moins un soin en 2022.
Face à ces constats, Solidaris se réjouit des améliorations qui ont contribué, sous cette législature, à faire reculer en moyenne le report de soins – notamment le tiers-payant généralisé – mais reste ferme et attentive en amenant des propositions concrètes qui permettront d’améliorer encore et plus largement l’accessibilité aux soins. Enfin et surtout, Solidaris continuera de se battre pour davantage d’équité dans ce domaine.
Concrètement, Solidaris recommande de :
- Assurer la gratuité des consultations chez le médecin généraliste et des soins dentaires de base ;
- Octroyer automatiquement le bénéfice de l’intervention majorée aux catégories sociales vulnérables (notamment bénéficiaires d’allocations d’invalidité, de chômage ou d’une pension de retraite isolé ou isolé avec charge de famille) ;
- Mettre en œuvre le plus rapidement possible la disposition légale prévoyant l’interdiction de la facturation de suppléments d’honoraires par le médecin aux patients vulnérables ;
- Individualiser complètement le droit aux prestations de chômage et d’indemnités par un alignement des prestations cohabitant sur le taux isolé ;
- Se pencher sérieusement sur les causes de l’incapacité de travail, les attaquer à la racine par la prise en considération de la pénibilité du travail (ex. travailleuses des titres-services, qui risquent quatre fois plus de tomber en incapacité de travail) mais aussi relever les seuils d’indemnisation.
Pour le Secrétaire général de Solidaris, Jean-Pascal Labille : « Devoir reporter des soins pour des raisons financières est inacceptable mais reste une réalité pour un nombre de plus en plus significatif de personnes. Face à des inégalités qui se creusent toujours plus, nous devons rapidement réagir pour que les catégories sociales les moins favorisées puissent également accéder à des soins de santé de qualité. »
Retrouvez tous les résultats de l’étude ici :