Comme chaque année depuis 2015, Solidaris a interrogé 1000 personnes concernant le report de soins. Le constat est accablant. Aujourd’hui, en Wallonie et à Bruxelles, près d’une personne sur deux ayant besoin de soins doit y renoncer pour des raisons financières !
L’enquête de Solidaris montre que le report de soins ne cesse d’augmenter ces dernières années (+13,2 points entre 2015 et 2021). Tous types de soins confondus, 45% des belges francophones qui en avaient besoin déclarent avoir renoncé à au moins un soin cette année.
Non seulement une part importante des personnes en situation de précarité est concernée (près de 60%), creusant les inégalités sociales et de santé, mais le report de soins touche aussi de plus en plus les classes moyennes. Le report y a augmenté de 17 points en 6 ans. A cela s’ajoute la situation des personnes en incapacité de travail qui reste particulièrement problématique : elles sont trois sur quatre à avoir dû reporter au moins un soin en 2021.
Notre enquête révèle par ailleurs que le report de soins a fortement augmenté chez les spécialistes (+12.2 points) et pour les soins en santé mentale (+10 points) depuis 2015. Ainsi, en 2021, 27% des personnes qui en avaient besoin ont dû reporter des soins psychologiques ou des rendez-vous chez des spécialistes pour des raisons financières. A noter toutefois que ce sont les soins dentaires qui restent les plus touchés par le report de soins pour raisons financières (30%).
De lourdes inégalités
Les femmes, les familles monoparentales et les 40-59 ans sont davantage concernés par le report de soins. Alors qu’une femme sur deux (50,8%) a dû renoncer à au moins un soin cette année (+11.2 points), le chiffre est de 44,3% chez les hommes (+12.7 points). L’inégalité entre hommes et femmes persiste bel et bien quant à l’accès aux soins de santé.
Du côté des familles monoparentales, on parle de deux personnes sur trois (66,7%) concernées, un type de structure familiale très durement touché.
Quant aux 40-59 ans, ils sont près de 6 sur 10 (57.7%) à avoir reporté au moins un soin en 2021. Se soigner ou se priver de soins devient une variable d’ajustement dans le budget des ménages.
Plusieurs recommandations
Face à ces constats, Solidaris plaide pour garantir l’accessibilité aux soins de santé, d’une part en portant une attention particulière aux populations plus fragiles sur le plan socio-économique et de la santé, d’autre part en revendiquant le remboursement intégral des soins de santé de première ligne.
Cela passe principalement par :
- Les soins de première ligne totalement remboursés chez le médecin généraliste et le dentiste pour les patients ayant ouvert un Dossier Médical Global auprès de leur médecin généraliste.
- Le renforcement de l’accès aux soins psychologiques en poursuivant les efforts en la matière, dans le cadre de la récente convention INAMI prévoyant le remboursement des consultations chez le psychologue sous certaines conditions.
- L’octroi automatique du droit à l’intervention majorée aux ménages en difficultés comme les familles monoparentales avec titulaire chômeur de longue durée, les ménages avec titulaire chômeur de longue durée isolé ou chef de ménage.
- Le tiers-payant obligatoire généralisé pour les bénéficiaires de l’intervention majorée et les malades chroniques. Pour les bénéficiaires ordinaires, le tiers-payant doit devenir un droit : si ils le demandent, le prestataire de soins ne peut le refuser.
- Le relèvement des indemnités minimales jusqu’à 10% au-delà du seuil de pauvreté dès le premier jour d’incapacité.
- L’individualisation des droits sociaux, à commencer par l’alignement du statut de cohabitant sur celui de personne isolée dans le secteur des indemnités.
- La réforme du financement hospitalier et de la nomenclature doit se traduire par une réduction des suppléments pour les patients, tant à l’hôpital qu’en ambulatoire.
- Une augmentation des taux de conventionnement des spécialistes.
Retrouvez tous les résultats de l’étude ici :