Différentes études se sont penchées sur l’évaluation des modes d’organisation et de financement de la médecine générale.
En Belgique, le Centre fédéral d’Expertise des Soins de Santé (KCE) a réalisé en 2008 une vaste
étude comparant le système de paiement forfaitaire et le système de paiement à l’acte. L’accent était cependant davantage mis sur l’aspect coûts des deux systèmes pour l’assurance maladie.
Sans ticket modérateur ni supplément, la médecine au forfait est – en principe – plus accessible, en particulier pour les patients plus défavorisés sur le plan socio-économique. Mais cet aspect n’a jamais été évalué de manière approfondie : dans quelle mesure la médecine au forfait est-elle plus accessible que la médecine à l’acte ?
Pour répondre à cette question, le service d’études de l’UNMS a comparé la proportion de patients bénéficiaires de l’intervention majorée (BIM) dans les pratiques à l’acte et dans les pratiques au forfait dans les quartiers de la capitale.
L’analyse confirme que :
1) A Bruxelles, les affiliés de la Mutualité Socialiste – Solidaris soignés au forfait se concentrent dans les zones socio-économiquement les plus défavorisées, soit les quartiers situés au nord de la capitale et le long du canal, où sont implantées la majorité des maisons médicales travaillant au forfait (MM).
2) Les MM recrutent toujours plus de BIM (36%) que les médecins généralistes travaillant à l’acte (29%) après correction pour le biais d’implantation. Parmi les 521 quartiers statistiques (QS) bruxellois, 331 QS (soit 64%) montrent un meilleur recrutement BIM en MM et 190 QS (36%) montrent un meilleur recrutement BIM chez les médecins généralistes travaillant à l’acte.
3) En affinant ce résultat moyen par quartier, nous mettons en évidence que dans 31% des QS, la différence de recrutement de BIM en faveur des MM est statistiquement significative (alors que le meilleur recrutement de BIM par les médecins généralistes n’est mis en évidence statistiquement que dans 5% des QS). En d’autres termes, dans près d’un QS sur trois, la proportion de BIM est significativement supérieure parmi les patients soignés au forfait à la proportion de BIM parmi les patients soignés à l’acte. La différence de recrutement s’élève à 18%.
4) Enfin, les quartiers où le recrutement de BIM est plus important en MM ne sont pas exclusivement concentrés dans les communes du nord de Bruxelles, mais sont disséminés un peu partout dans la capitale, y compris dans le sud notamment à Uccle, Woluwe-Saint-Pierre ou encore Watermael-Boitsfort. Ces résultats sont à recadrer avec la méthodologie et les données utilisées. En effet, il faut un minimum d’effectifs pour mettre en évidence statistiquement une différence de recrutement. Nous avons dû ainsi recourir à la distribution binomiale exacte pour pallier aux effectifs inférieurs à 30 abonnés dans certains QS.
Il est probable que le meilleur recrutement de BIM en MM ait été significatif pour un plus grand
nombre de QS si on avait recouru à une autre méthode – par exemple en regroupant les QS par typologie tenant compte du profil socio-économique des affiliés – mais cela n’était pas possible au vu de nos données disponibles.
Par ailleurs, les données de la Mutualité Socialiste – Solidaris reflètent le profil particulier de nos affiliés plus touchés par les inégalités sociales de santé et dont l’espérance de vie est plus courte.
Cela peut ainsi diminuer la sensibilité et masquer plus de différence de recrutement de BIM entre les deux systèmes.
Pour conclure, cette analyse met en évidence une meilleure accessibilité des maisons médicales au forfait pour la population BIM de la capitale et ce quel que soit le quartier.
En outre, elle montre également que la médecine générale à l’acte reste très accessible dans la
capitale, relevant de la sorte les efforts particuliers fournis pas certains médecins généralistes à l’acte lorsqu’ils travaillent dans des quartiers socio-économiquement défavorisés. Leur accessibilité est apparemment large compte tenu des contraintes, inhérentes au financement à l’acte lui-même (à savoir le ticket modérateur et la limitation réglementaire du tiers-payant).
Pour la Mutualité Socialiste – Solidaris, les maisons médicales travaillant au forfait sont un système à promouvoir, parallèlement à la médecine à l’acte, en particulier en ces temps de crise où une part de plus en plus importante de la population reporte les soins pour raisons financières.