Comme chaque année depuis 2015, Solidaris a interrogé 1000 personnes concernant le report de soins. En 2024, si le renoncement pour raisons financières diminue, les résultats restent alarmants : près de 4 Belges francophones sur dix déclarent avoir renoncé à une prestation de santé.
Cette enquête met en lumière une réalité préoccupante : malgré une baisse par rapport aux années précédentes, le renoncement aux soins touche encore 41 % des Belges francophones, contre 32 % en 2015. Si la situation semble s’améliorer depuis la pandémie, les obstacles financiers et les inégalités d’accès aux soins demeurent une problématique majeure.
Des disparités marquées et une précarisation accrue
Les tendances reflètent des inégalités sociales persistantes et une précarisation des profils les plus vulnérables en comparaison à 2015 :
- Près d’une femme sur deux (48 %) a renoncé à au moins un soin en 2024 pour des raisons financières, contre un homme sur trois (33 %).
- Les seniors (60 ans et plus) sont de plus en plus touchés, avec une hausse de 25 points en neuf ans (40 % en 2024).
- Un gradient social constant depuis 2017 :
– Seuls les groupes sociaux les plus favorisés (groupes 1 et 2) maintiennent des résultats stables, voir en amélioration depuis 2015.
– Les écarts entre les groupes sociaux intermédiaires (5-6) et les plus précaires (7-8) diminuent, suggérant une précarisation de la “classe moyenne inférieure” et une homogénéisation du renoncement auprès de la moitié la moins aisée de la population. - En ce qui concerne les structures familiales, les personnes isolées connaissent la plus forte augmentation sur neuf ans (+20 points, 45 % en 2024), tandis que les familles monoparentales enregistrent une hausse de 13 points, atteignant 60 % en 2024.
- Malgré une baisse significative en un an (-16 points), les personnes en incapacité de travail demeurent la catégorie “professionnelle” la plus touchée, avec un taux de renoncement extrêmement élevé (63 %).
Des mesures pour combattre le renoncement financier
Les ménages belges consacrent une part plus importante de leurs revenus aux dépenses de santé par rapport aux pays voisins. Cette situation est en partie liée au manque de sécurité tarifaire et au sous-financement de certains soins.
Solidaris appelle à des actions urgentes pour lutter contre cette inégalité en matière de santé, en agissant sur 3 axes prioritaires :
- Garantir un niveau de revenu digne pour les personnes en incapacité de travail. Pour ce faire, nous proposons :
– Un relèvement des indemnités minimales à 10 % au-dessus du seuil de pauvreté dès le premier mois d’incapacité (actuellement à partir du 3e mois).
– Revoir les règles de calcul des indemnités pour les travailleurs reprenant à temps partiel car celles-ci sont défavorables aux travailleurs à faible revenu. - Renforcer la protection financière des publics plus fragiles, avec plusieurs mesures :
– Interdire les suppléments d’honoraires pour les bénéficiaires du statut BIM, dès 2025-2026.
– Élargir l’octroi automatique de ce statut notamment aux familles monoparentales.
– Généraliser l’obligation du tiers-payant à tous les patients et pour tous les soins ambulatoires.
– Fixer un plafond de prix d’hébergement en maisons de repos, en tenant compte des revenus des résidents et du juste financement des institutions. - Des soins mieux remboursés et plus de sécurité tarifaire pour les patients. Nous préconisons :
– Une augmentation du remboursement des soins insuffisamment couverts par l’assurance maladie, en particulier les soins dentaires et de santé mentale.
– Une réforme du système de conventionnement pour inciter plus de prestataires de soins à respecter les tarifs de l’assurance maladie. Nous demandons de prévoir un “bouclier tarifaire”, c’est-à-dire une disposition légale qui protègerait chaque patient contre les coûts excessifs.
– L’adoption d’une norme de croissance de 3 % du budget de l’assurance maladie pour répondre aux besoins croissants liés au vieillissement et aux avancées médicales.
Retrouvez tous les résultats ici : Télécharger notre enquête